Le 11 mars 2020, l'Organisation mondiale de la santé a officiellement déclaré que l'épidémie de COVID-19 était devenue une pandémie mondiale, à la suite de quoi le gouvernement du Québec a décrété1 , le 13 mars 2020, l’état d’urgence sanitaire à l'échelle de la province. Le décret a été rendu en vertu de l'article 118 de la Loi sur la santé publique, CQLR c S-2.2 (la « LSP »). L’état d’urgence sanitaire est toujours en vigueur à la date de publication du présent article.
La LSP permet au gouvernement d'exercer des pouvoirs importants pour assurer la protection de la santé de la population et atténuer les répercussions de la COVID-19. Une série de mesures ont été adoptées au Québec à cet égard, dont les suivantes :
Selon toute vraisemblance, la crise de la COVID-19 aura des répercussions sur l'industrie de la construction au Québec pendant un certain temps encore, soit au moins jusqu'au 4 mai et peut-être même plus longtemps. Au fur et à mesure que la situation évolue, ces répercussions se feront sentir dans tous les secteurs de l'industrie de la construction au Québec et toucheront tant les maîtres d’ouvrage, les promoteurs, les entrepreneurs et les fournisseurs que les autres intervenants qui participent directement ou indirectement à l’industrie de la construction dans la province.
La pandémie de COVID-19 a entraîné et continuera d'entraîner des retards et de perturber le déroulement des projets. À cet égard, il est essentiel pour les participants du secteur de la construction de bien comprendre la portée des clauses de force majeure prévues dans les contrats qu’ils ont signés, ainsi que la notion de force majeure définie au Code civil du Québec.
La détermination de ce qui constitue un cas de force majeure dépend de plusieurs facteurs et notamment, de l’existence ou non de clauses de force majeure dans les contrats. Cela dit, l'absence d’une clause de force majeure n'est pas déterminante en soi, puisqu'un événement tel que la pandémie de COVID-19 que nous vivons actuellement et les mesures extraordinaires que les gouvernements ont prises peuvent être qualifiés de force majeure en droit civil québécois, même si le contrat applicable ne contient aucune clause de force majeure.
Au Québec, contrairement aux provinces de common law, les parties à un contrat peuvent invoquer de plein droit la force majeure pour se libérer de leurs obligations contractuelles. La notion de force majeure en droit civil est énoncée à l'article 1470 du Code civil du Québec (C.c.Q.), qui se lit comme suit :
1470. Toute personne peut se dégager de sa responsabilité pour le préjudice causé à autrui si elle prouve que le préjudice résulte d’une force majeure, à moins qu’elle ne se soit engagée à le réparer.
La force majeure est un événement imprévisible et irrésistible; y est assimilée la cause étrangère qui présente ces mêmes caractères.
La force majeure telle que la définit l'article 1470 du C.c.Q. n'est pas d'ordre public et les parties sont libres d’y déroger par des clauses contractuelles, c’est-à-dire d’adopter une définition plus large (ou moins large) de la force majeure que celle du C.c.Q. ou d’exclure complètement l'application de l’article du C.c.Q. Toutefois, à moins que la notion de force majeure telle qu'énoncée à l'article 1470 du C.c.Q. ne soit expressément exclue, c’est cet article qui s’appliquera si le contrat ne contient pas de clause de force majeure. De plus, lorsque la définition de force majeure qui figure dans le contrat n'est pas, de l'avis des tribunaux, suffisamment précise, ces derniers pourraient se servir de l’article du C.c.Q. et de la jurisprudence applicable pour clarifier la situation et prendre une décision.
Le premier paragraphe de l'article 1470 du C.c.Q. énonce les effets d'un cas de force majeure, à savoir que le cocontractant qui l’invoque est dégagé de toute responsabilité découlant de l'inexécution de ses obligations contractuelles en raison de la force majeure.
Les conditions qui s’appliquent pour déterminer s’il y a force majeure sont énoncées dans le deuxième paragraphe de l'article 1470 du C.c.Q., qui prévoit que l'événement doit être à la fois imprévisible et irrésistible :
La plupart des contrats de construction contiennent des clauses de force majeure. À l'instar de l'approche adoptée par le C.c.Q., ces clauses servent généralement à dégager une partie de l'exécution de ses obligations (ou à suspendre l'exécution des obligations de la partie) dans la mesure où ces obligations sont affectées par un événement de force majeure.
Bien que le libellé des clauses de force majeure ne soit pas toujours identique, il définit généralement la force majeure un peu de la même façon que le C.c.Q., c’est-à-dire comme un événement ou une situation qu’il n’était pas possible de prévoir ou sur lequel il était impossible d’avoir un contrôle raisonnable et qui rend impossible l'exécution d’une ou des obligation(s) prévue(s) au contrat. Il arrive souvent que les clauses de force majeure contiennent une liste des événements qui constituent une force majeure, laquelle peut comprendre les « épidémies », les « pandémies » ou les « décrets gouvernementaux visant l’arrêt des travaux ». Toutefois, et comme nous l’avons mentionné plus haut, même si la situation de la COVID-19 ne peut pas être liée à un élément précis du libellé de la clause de force majeure, les parties peuvent s'appuyer sur les termes généraux de celle-ci, à savoir « imprévisibilité », « irrésistibilité », « cas fortuits » ou « événements échappant au contrôle raisonnable d'une partie », pour faire valoir que la pandémie constitue un cas de force majeure.
De même, les clauses de force majeure prévoient généralement des dispositions strictes en matière de notification, exigeant que la partie qui souhaite être dégagée de l'exécution de ses obligations en raison d’une force majeure envoie un avis à cet égard à l’autre partie au contrat dans le délai prévu, faute de quoi elle peut perdre le droit de réclamer toute réparation découlant de la survenance de l’événement de force majeure. Si une partie a l'intention de se prévaloir d'une clause de force majeure, elle doit veiller à examiner les exigences en matière de notification prévues dans le contrat et à les respecter. La suspension des délais de prescription et de procédure civile annoncée au Québec (voir plus haut) n'entraîne pas la suspension des délais contractuels, y compris des délais relatifs à l’envoi d’avis de force majeure.
Si la clause de force majeure est claire et non ambiguë, le recours à l'article 1470 du C.c.Q. n'est pas nécessaire, car le tribunal se limitera à appliquer la clause aux faits dont il est saisi7. Si, par contre, le tribunal constate une ambiguïté ou un manque de clarté dans la clause de force majeure, il pourra se servir de la notion de force majeure en droit civil afin de lever toute ambiguïté. Par exemple, lorsqu'une clause de force majeure contient une liste non exhaustive d'événements potentiels de force majeure8, les tribunaux peuvent se tourner vers des cas de jurisprudence qui interprètent l'article 1470 du C.c.Q. pour déterminer si un événement qui n’est pas nommé dans la clause peut être considéré comme un événement de force majeure en vertu du contrat9.
Par conséquent, chaque situation doit être analysée au cas par cas, à la lumière du libellé des clauses et des dispositions contractuelles existantes, des faits et dans certaines situations (notamment lorsque la clause de force majeure doit faire l’objet d’une interprétation plus poussée) des critères énoncés dans l’article 1470 du C.c.Q.
L'éclosion de la COVID-19 au Québec et les mesures prises par le gouvernement à ce jour pour lutter contre la pandémie soulèvent un certain nombre de points que les parties prenantes à des projets de construction au Québec doivent prendre en considération.
Pour obtenir de plus amples renseignements, veuillez communiquer avec Lampros Stougiannos, Erica Shadeed ou un autre membre du groupe de droit de la construction de Dentons au Québec.
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