Adopté en première lecture par le Sénat en mars, puis par l’Assemblée nationale le 6 octobre dernier, le Sénat a donné son feu vert aux conclusions de la commission mixte paritaire le 27 octobre dernier sur le projet de loi d’accélération et de simplification de l’action publique (dite « ASAP »), avant que l’Assemble Nationale ne se soumette au même exercice.
Dans l’intervalle, ce projet de loi a connu quelques évolutions substantielles en raison de la crise sanitaire, avec pour ambition d’en faire l’un des premiers actes de la « relance ». Cette relance sera vraisemblablement plus difficile en raison du confinement à nouveau en vigueur depuis le 30 octobre, et on devra sans doute s’attendre à un renforcement ou une évolution de ces mesures.
Par ailleurs, le texte a fait l’objet de vives contestations sur le volet environnemental ou encore pour son caractère « fourre-tout ». Reste donc à voir si le texte passera le cap du Conseil constitutionnel auquel il a sans surprise été déféré le 3 novembre dernier.
Affaire à suivre donc…
Pour l’heure, les principales ambitions du projet de loi qui intéresseront les entreprises et les opérateurs industriels sont, d’une part, d’accélérer et de sécuriser les installations industrielles (Titre III), d’autre part, de simplifier de façon diverse et variée les procédures administratives qui leur sont applicables (Titre IV). En effet, le projet de loi ASAP comporte des mesures en droit de la commande publique (1) et en droit de l’environnement (2) qui intéresseront sans nul doute les porteurs de projet.
Parmi les nouvelles mesures qui devraient permettre et faciliter la relance économique, nombreuses sont celles qui concernent la commande publique, domaine qui représente près de 10% du PIB de la France.
Parmi ces mesures, il est à noter :
Pour accélérer la relance économique, le législateur entend permettre aux acheteurs de conclure des marchés publics de travaux sans procédures de publicité et mise en concurrence lorsque leur besoin est inférieur à 100 000 euros.
Actuellement, l’article L. 2122-1 du code de la commande publique permet aux acheteurs de passer un marché sans publicité ni mise en concurrence préalables dans certains cas, en raison notamment de l’existence d’une première procédure infructueuse, d’une urgence particulière, de son objet ou de sa valeur estimée, le respect d’une telle procédure étant alors inutile, impossible ou manifestement contraire aux intérêts de l’acheteur.
Le projet de loi vise à intégrer à la liste de ces cas celui de l’« intérêt général ». Cette notion, si elle est bien connue de la commande publique n’est pas particulièrement définie, ce qui ne manquera pas de poser de sérieuses questions d’appréciation.
Les contrats de la commande publique ayant précisément pour objet de répondre à un besoin de l’acheteur qui, par définition, agit dans l’intérêt général, les acheteurs devront donc être particu-lièrement prudents lorsqu’ils utiliseront cette notion pour conclure un marché sans publicité ni mise en concurrence. En effet, le risque de porter atteinte aux grands principes de la commande publique, donc d’augmenter le risque contentieux de leurs procédures et marchés publics, n’est pas négligeable.
La direction des affaires juridiques de Bercy a néanmoins indiqué que « l’intérêt général » sera précisé par voie réglementaire.
Le projet de loi introduit à l’article L. 2141-3 du code de la commande publique la possibilité pour les entreprises qui bénéficient d'un plan de redressement de se porter candidates aux contrats de la commande publique.
En outre, les articles L. 2195-4, L.2395-2 et L. 3136-4 du même code sont modifiés afin d’interdire aux acheteurs et autorités concédantes de résilier un marché public ou une concession au seul motif que l'opérateur économique fait l'objet d'une procédure de redressement judiciaire.
De telles modifications sont les bienvenues, dans le contexte (renouvelé) d’incertitude et d’économie fragilisée actuel.
Est introduite l’obligation de réserver une partie de l'exécution des marchés publics globaux aux PME et aux artisans (actuellement en vigueur pour les seuls marchés de partenariat (article L. 2213-14 du code de la commande publique)), part dont l’acheteur devra tenir compte parmi les critère d’attribution de ces marchés.
Une fois de plus, le Gouvernement montre son attachement à permettre une concurrence « réelle » vis-à-vis des PME, très fragilisées par la crise, pour lesquelles les marchés publics globaux – auxquels les acheteurs ont beaucoup recours – sont désormais (encore plus) accessibles.
Comme pour les contrats de concession, le projet de loi souhaite appliquer le régime de modifi-cation prévu par l’article L. 2194-1 du code de la commande publique aux marchés publics conclus avant le 1er avril 2016. Ainsi, les acheteurs pourront modifier ces marchés conclus pour une longue durée sur la base du dispositif prévu par le code, par exemple lorsqu’une telle modification est rendue nécessaire par des circonstances qu'un acheteur diligent ne pouvait pas prévoir.
Le dispositif phare du projet de loi en matière de commande publique reste la création d’un dispositif pérenne, au sein du code, permettant de répondre aux situations de « circonstances ex-ceptionnelles ».
Ce dispositif vise très clairement à codifier les mesures d’adaptation de la commande publique qui avaient été prévues par l’ordonnance n° 2020-319 du 25 mars 2020 pour faire face à au premier confinement qui avait suivi la crise du covid-19.
En l’état, les nouveaux articles L. 2711-1 (pour les marchés) et L. 3411-1 (pour les concessions) du code de la commande publique se fondent sur « les circonstances exceptionnelles », sans plus de précisions. Cette nouvelle rédaction contraste avec le texte adopté en première lecture par l’Assemblée national qui mentionnait « notamment » les cas de guerre, épidémie, pandémie, catastrophe naturelle ou « crise économique majeure ».
Il est clair que l’interprétation de la notion de « circonstances exceptionnelles » - et donc l’application d’un tel dispositif - sera laissée à l’appréciation des acheteurs et autorités concé-dantes puisque ces derniers devront mettre en œuvre ces dispositions « lorsqu’elles sont néces-saires dans la passation ou l’exécution » d’un marché public ou d’un contrat de concession, « pour faire face aux difficultés liées à la survenance de circonstances exceptionnelles ».
Comme cela avait été prévu par l’ordonnance susvisée, il est notamment possible d’aménager les modalités de mise en concurrence, les conditions de prolongation des contrats et leurs délais d’exécution. Ces mesures permettront de neutraliser les stipulations relatives aux pénalités de retard et autres sanctions.
L’initiative du Gouvernement peut paraître louable, car elle s’inscrit dans un souci constant de sécuriser l’achat public en toutes circonstances. Il n’en reste pas moins que l’introduction d’un tel dispositif reposant sur des notions aussi sujettes à interprétation pourrait être vecteur de risques, et ce autant en cours de passation (recours des candidats évincés notamment) qu’en exécution, où les discussions entre les parties pourraient s’avérer laborieuses.
L’accélération de l’implantation d’industries sur le territoire est l’un des enjeux originels du projet de loi ASAP, bien avant de devenir une nécessité de la relance économique.
Les dispositions prévues dans ce domaine s'inscrivent dans le cadre des travaux menés sur « le pacte productif » avec l’ambition de renouveler le tissu industriel et économique de la France.
Le projet de loi ASAP prévoit ainsi d’assouplir, de sécuriser les procédures prévues par le code de l’environnement et de mieux les articuler avec celles prévues par d’autres législations (urbanisme, patrimoine, etc.), afin d’apporter plus de sécurité juridique aux porteurs de projets. Beaucoup de mesures sont ainsi introduites, dont celles brièvement présentées ci-après.
Actuellement, les arrêtés ministériels définissant les prescriptions applicables aux ICPE s’appliquent de plein droit aux installations nouvelles, en ce compris aux projets en cours d’instruction (art. L. 512-5, L. 512-7 et L. 512-10 c. env.). En revanche, ils sont applicables de manière différée aux installations existantes.
Avec la mesure proposée, le projet déposé au service instructeur sera considéré comme une installation existante. Concrètement, cela veut dire qu’au cours de l’instruction de la demande d’autorisation, le pétitionnaire n’aura pas à adapter immédiatement son projet aux éventuelles nouvelles prescriptions. Il bénéficiera, en principe, des mêmes délais que les installations exis-tantes pour se mettre en conformité.
Cette mesure est néanmoins accompagnée d’un garde-fou qui avait été suggéré par l’Assemblée générale du Conseil d’État dans son avis n° 399408 du 30 janvier 2020 et qui reste le bienvenu compte tenu de la tension entourant les accidents et risques industriels : l’édiction, pour chaque projet, de prescriptions individuelles destinées à prévenir les dangers ou incidences négatives éventuellement identifiés sera toujours permis. Il sera ainsi toujours possible d’appliquer aux projets en cours les prescriptions nécessaires à la préservation de la sécurité, salubrité et santé publiques.
La loi de 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages avait assez largement réformé la procédure d’évaluation environnementale pour une meilleure prise en compte des effets cumulés de programmes de travaux relevant d’un même « projet », et ce afin d’éviter le « saucissonnage » des opérations de construction.
Or, l’article 23 du projet de loi entend permettre une actualisation de l’étude d’impact, lors-qu’elle est requise au titre d’une telle procédure, non pas pour un « projet » dans son ensemble mais pour la seule opération nouvellement projetée.
Autrement dit, dans une zone industrielle avec une pluralité de maîtres d’ouvrage et d’opérations, l’actualisation de l’étude d’impact devra se faire opération par opération et non plus sur l’ensemble du projet, sauf impacts cumulés nouveaux.
Comme l’a souligné l’opposition, ce nouveau champ d’actualisation permettrait d’évaluer les impacts environnementaux de façon fractionnée, ce qui contreviendrait tout à fait au principe posé par la loi de 2016. Cependant, selon la ministre en charge de l’industrie, Mme Agnès Pan-nier-Runacher, le principe semble respecté dès lors que les effets cumulés continueront d’être analysés à l’échelle du projet.
Le projet de loi ASAP n’est pas en reste s’agissant des installations produisant de l’énergie renouvelable.
Il entend inciter les collectivités publiques à recourir aux EnR terrestres par diverses mesures de simplification, dont
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