Dans un arrêt du 31 mai 2018, la Cour de Justice de l’Union européenne (CJUE) s’est prononcée sur le point de savoir si la dénonciation anticipée d’un accord de coopération entre KPMG DK et KPMG International, condition suspensive d’une opération de concentration projetée entre KPMG DK et EY, constituait un cas de « Gun Jumping », c’est-à-dire contraire à l’obligation de suspendre la réalisation d’une opération de concentration jusqu’à son autorisation.
KPMG DK était liée à KPMG International par un accord de coopération qui permettait à KPMG DK de faire partie du réseau global de KPMG. En novembre 2013, KPMG DK et EY ont conclu un accord de concentration, lequel prévoyait notamment comme condition suspensive la résiliation de l’accord de coopération entre KPMG DK et KPMG International que KPMG DK a immédiatement mise en œuvre suite à la signature de l’accord. L’opération projetée entre KPMG DK et EY a été notifiée à l’autorité danoise de la concurrence un mois plus tard et autorisée le 28 mai 2014.
Indépendamment de cette autorisation, l’autorité danoise de la concurrence a sanctionné KPMG DK et EY pour avoir, selon elle, méconnu l’interdiction prévue par la loi danoise sur la concurrence de mettre en œuvre une opération de concentration avant son autorisation. Elle a considéré en effet que la résiliation par KMPG DK de l’accord la liant à KMPG International constituait la mise en œuvre anticipée de l’opération de concentration projetée avec EY. A l’appui de son raisonnement, l’autorité danoise a relevé que la résiliation de cet accord était une condition de l’opération de concentration, qu’elle était irréversible et susceptible de produire des effets sur le marché au cours de la période comprise entre la dénonciation de l’accord et l’autorisation de la concentration.
Suite au recours par EY contre cette décision, le juge danois a saisi la CJUE en vue d’obtenir des précisions sur la portée de l’obligation de suspension énoncée à l’article 7 §1, du règlement n° 139/2004 relatif au contrôle des concentrations. Plus précisément, il a interrogé la Cour sur la question de savoir si de tels agissements pouvaient être considérés comme entrainant la réalisation d’une concentration et si, à cet égard, le fait que ces agissements avaient eu des effets significatifs sur le marché était pertinent.
S’agissant de la portée de l’article 7§1 du règlement n°139/2004, la CJUE se fonde sur la finalité du règlement, à savoir l’interdiction des concentrations entravant de manière significative une concurrence effective dans le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci, pour affirmer que l’interdiction qui y est édictée se limite aux opérations contribuant à la réalisation d’une concentration. Le juge de l’Union rappelle donc la définition de la notion de concentration qui nécessite un changement durable de contrôle de l’entreprise cible et conclu que les opérations qui ne sont pas nécessaires pour y parvenir, ne relèvent pas de l’article 7 §1 du règlement n° 139/2004, quand bien même de telles opérations seraient accessoires ou préparatoires à la concentration. En l’espèce, l’opération litigieuse était détachable de la réalisation de la concentration en ce sens que la dénonciation de l’accord de coopération n’a pas permis à EY d’acquérir une influence quelconque sur KPMG DK. Partant, la CJUE a estimé qu’il n’était pas nécessaire de se prononcer sur la question de savoir si les effets de l’opération devaient être pris en compte.
Dans cet arrêt, la Cour suit les recommandations de son avocat général Nils Wahl en traçant les contours d’une définition bien délimitée du Gun Jumping et rend une décision proportionnée. En revanche et comme le rappelle la CJUE, les comportements accessoires à une opération ne constituant pas du Gun jumping peuvent toujours être appréhendés sur le terrain des règles sur les ententes. Une double analyse doit donc toujours être menée.
Dans deux arrêts du 16 mai 2018, la Cour de cassation a censuré par deux fois la Cour d’appel de Paris pour avoir conclu à l’illicéité de l’accord de distribution sélective de la société Coty France du simple fait que certaines clauses pouvaient être qualifiées de clauses « noires » au sens du règlement européen d’exemption par catégorie relatif aux accords verticaux.
Il faut rappeler qu’en mai et juin 2016, la Cour d’appel de Paris avait refusé de faire droit aux recours de Coty France dans le cadre des actions engagées à l’encontre des sociétés France télévisions, Marvalle LLC et de Mme Y., d’une part et de Brandalley France, d’autre part, en raison du non-respect par ces dernières (non agréées) de la prohibition de la revente des produits en dehors de son réseau de distribution sélective.
La Cour d’appel de Paris avait en effet considéré que le réseau de distribution sélective de Coty France ne pouvait bénéficier ni de l’exemption catégorielle, ni de l’exemption individuelle, en raison de l’existence de restrictions caractérisées dans son contrat de distribution sélective. Les clauses alors qualifiées de « noires » étaient essentiellement : i) l’obligation pour les membres des comités d’entreprises ou des collectivités de se déplacer individuellement en magasin pour effectuer leurs achats, ii) l’interdiction des reventes en dehors du réseau de distributeurs agréés et iii) le respect d’un délai d’un an avant de procéder à une vente active d’un nouveau produit contractuel vers un autre Etat membre dans lequel ce produit n’a pas été lancé.
La Cour de cassation est clairement venue rappeler à l’ordre la Cour d’appel en indiquant par un attendu de principe dénué d’ambiguïté que « la circonstance, à la supposer établie, que l’accord ne bénéficie pas d’une exemption par catégorie n’implique pas nécessairement que le réseau de distribution sélective contrevient aux dispositions de l’article 101 §1 TFUE ».
La cour d’appel de renvoi sera donc tenue d’analyser la licéité du réseau de distribution sélective de Coty France au regard de l’article 101 § 1 TFUE et des principes posés par la célèbre jurisprudence Métro, à savoir : le choix des revendeurs en fonction i) de critères objectifs de caractère qualitatif, ii) fixés d’une manière uniforme à l’égard de tous les revendeurs potentiels, iii) appliqués de façon non discriminatoire, et iv) que les critères définis n’aillent pas au-delà de ce qui est nécessaire.
S’agissant des clauses litigieuses, il convient de préciser qu’elles ont été validées par la récente décision de la cour d’appel de Paris du 28 février 2018, Coty France / Showroomprivé.com.
Après avoir mené une large consultation publique sur la réforme du contrôle des concentrations en France, l’Autorité considère que la révision des seuils de contrôle actuels n’est pas nécessaire et ne souhaite pas ajouter un nouveau seuil lié à la valeur de la transaction pour contrôler l’acquisition de start-up à haute valeur ajoutée, contrairement à la réforme menée récemment par les autorités allemandes et autrichiennes en ce sens. L’Autorité soumet toutefois à la consultation publique l’introduction d’un contrôle ex-post, c’est-à-dire pour les opérations n’entrant pas dans les seuils français mais posant des problèmes très importants de concurrence, comme peuvent le faire d’ores et déjà l’autorité anglaise et l’autorité suédoise.
L’Autorité annonce par ailleurs une extension du nombre d’opérations pouvant bénéficier de la procédure simplifiée, à savoir un dossier de notification plus allégé et un délai de traitement plus rapide, réduit de 5 à 3 semaines. Ceci pourrait couvrir un grand nombre des opérations notifiées puisque cela inclurait notamment toutes celles où les parties ne disposent pas plus de 25% de part de marché sur le même marché ou en cas d’intégration verticale, lorsque la part de marché sur le marché amont ou aval est inférieur à 30%.
Enfin, l’Autorité annonce une procédure ultra-simplifiée en ligne sur le site de l’Autorité pour les opérations qui bénéficient aujourd’hui de la procédure simplifiée, c’est-à-dire celles sans chevauchement d’activités entre les parties ou les opérations dans le commerce de détail sans changement d’enseigne.
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