Le 9 avril 2014, l'Honorable Michel Yergeau de la Cour supérieure du Québec a rendu un jugement très attendu sur la controverse de l’affichage des marques de commerce dans une langue autre que le français. Le 8 mai dernier, le gouvernement du Québec a décidé de porter cette décision en appel.
Depuis son adoption au Québec en 1977, la Charte de la langue française ( la « Charte » ) a suscité un grand nombre de controverses et de débats. Adoptée dans le but de protéger la langue française devenue vulnérable dans une province aussi multiculturelle que le Québec, la Charte exige que tout affichage public, signe, publicité commerciale, inscription sur l’emballage des produits et toute publication de brochures, catalogues, dépliants, annuaires commerciaux ou tout autre publication soit en français, ou principalement en français. Cependant, le Règlement sur la langue du commerce et des affaires (le « Règlement » ) prévoit une exception à cette règle générale en permettant l'utilisation d'une marque de commerce enregistrée qui n'est pas en français. En effet, une marque de commerce dans une langue autre que le français peut être utilisée au Québec, à condition qu'aucune version française de la marque de commerce n’ait été enregistrée auprès de l'Office de la propriété intellectuelle du Canada (la « OPIC » ).
Jusqu'en 2010, l'Office québécois de la langue française (le « Bureau » ) interprétait le Règlement comme autorisant l’affichage public des marques de commerce dans une langue autre que le français, sans qu’il soit nécessaire de leur ajouter un générique français. Cependant, dans les dernières années, l'Office a revu son interprétation de l'exception prévue au Règlement. Ce changement d’interprétation donne lieu à ce qui a résulté en un conflit potentiel entre le Règlement et certains droits accordés en vertu de la législation fédérale des marques de commerce. En effet, le Bureau considère maintenant l’affichage des marques de commerce sur les bâtiments et les panneaux publics comme étant l’affichage du nom de l'entreprise, ce qui, en vertu de la Charte, requiert l'ajout d'un descriptif français, lorsque le nom est dans une langue autre que le français. Suite à cette nouvelle approche, le Bureau a commencé à envoyer des avis, des lettres de demande, ainsi que des avis de suspension des certificats de francisation et des déclarations d'infractions à plusieurs sociétés exigeant qu’elles se conforment avec leur récente interprétation de la Charte. Ces mesures ont déclenché le dépôt d'une requête en jugement déclaratoire par huit sociétés multinationales, soit Best Buy, Costco, Gap, Old Navy , Wal-Mart, Toys "R " Us, GUESS? et Curves, ayant pour but de confirmer leur droit d’afficher des marques de commerces en anglais sur les façades d’immeubles et des affiches conformément aux droits octroyés en vertu de la législation fédérale des marques de commerce.
Dans cette affaire, la Cour a déclaré que le concept de marque de commerce est une notion juridique distincte régi par ses propres règles qui diffèrent considérablement de celles concernant les noms commerciaux et les dénominations sociales. L'affichage d'une marque de commerce, en association avec les services et produits offerts par une entreprise, ne constitue pas un affichage du nom d’une entreprise, et donc, il n’existe aucune obligation d'ajouter un terme générique français. Le juge a statué que la Charte et le Règlement permettent, de façon spécifique, l’affichage de marques de commerce dans une langue autre que le français, sans l'ajout d'un terme générique français, à condition qu'aucune version française de la marque soit inscrite auprès de l'OPIC. Ces lois ne peuvent être interprétées de manière à ce que l’affichage de marque de commerce soit synonyme d’affichage de nom commercial ou de dénomination sociale. L’Honorable Yergeau a ajouté qu’à ce stade seule une modification législative du Règlement rendrait l’ajout d'un terme générique français à une marque de commerce en anglais obligatoire. Il est important de noter que ce jugement ne s'applique qu'aux marques de commerce déposées avec l' OPIC et ne concerne pas les marques de commerce non-enregistrées en anglais.
En l’espèce, la preuve a démontré que les marques de commerce de la majorité des requérants ne correspondent pas à leurs noms d’entreprise, et par conséquent ne constituent pas l’affichage d'un nom d’entreprise. Le procureur général du Québec, présent à titre de défendeur dans cette action, n'a pas réussi à démontrer que les marques de commerce en question avaient été utilisées comme noms d'entreprise. Au contraire, la preuve a démontré que les noms d’entreprise des multinationales étaient différents des marques de commerce utilisées et affichées.
Le 8 mai dernier, le procureur général du Québec a porté le jugement de la Cour supérieure en appel. Notons que, dans l’hypothèse où l’appel est rejeté,le Bureau pourra néanmoins demander une modification du Règlement afin de faire prévaloir son interprétation de la Charte. En attendant le jugement de la Cour d’appel, la décision de la Cour supérieure est suspendue.
Dentons Canada tient à remercier Sarah Villota-Nault (stagiaire en droit)
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